Dimanche 22 août
Il est temps de quitter les baléares. La météo annonce du vent d'est (4 à 5) et pour mardi un nouveau coup de vent. Du vent d'est, c'est ce qu'il nous faut. Et nous devons arriver sur la côte espagnole avant le mauvais temps…
9 h 30 : en mer ! Agitée ! Une forte houle d'ouest ne nous est pas favorable, de plus le vent d'est annoncé se fait attendre. Au bout de 4 à 5 heures, la houle s'apaise légèrement, elle continuera ainsi de s'aplanir d'heure en heure. Tout ce dimanche, nous faisons route à la voile et au moteur, puis dans la nuit, au moteur seul.

Lundi 23 août
Au milieu de la nuit, Jean Paul hisse à nouveau les voiles et peut couper un peu le moteur, puis nous apercevons un phare, mais lequel ?
Au petit jour, la côte se dessine devant nous, il est difficile de reconnaître le port car il y a de la brume au loin, un léger voile qui efface le relief. La ville qui grossit devant nous est Lloret de mar, ce n'est pas un port… Nous ne pouvions la reconnaître, nous n'étions pas descendus si sud à l'aller.
Il ne nous reste plus qu'à remonter le littoral vers le nord, pendant quelques milles et à 11 heures, nous entrons après 25 heures de mer dans le port de San Feliu de Guixols, juste au sud de Palamos, d'où nous étions partis pour la traversée-aller.
Dans l'après midi, après avoir passé une heure à remonter l'ancre pour l'oringuer, puis la rejeter avant de la remonter encore car elle était coincée au fond, nous finissons par faire un tour dans San Feliu de Guixols, petite ville aux rues étroites, égayées de nombreuses boutiques, restaurants, étalages ouverts sur les trottoirs… Un manège appelle les fistons de toutes ses lumières… Chacun quatre tours et nous repartons, pour admirer depuis les hauteurs de la corniche, la ville, le port et la mer qui vient lécher les roches du bord en brisant sur elles, ses tourbillons d'écume.
Au bout de la jetée, des pêcheurs munis de bouchons lumineux, taquinent on ne sait quels poissons à la lumière des lumogaz.
Ce lundi soir, j'écris tandis que les 3 "hommes" alignés côte à côte dans le même lit, sont installés comme des rois. Le plus petit dort, les deux autres lisent, et moi, il me reste le pied du lit… Comme décor, devant moi, la ville illuminée qui se reflète dans l'eau noire, une lointaine musique de samba, dominée de temps à autre par des roulements de tonnerre qui résonnent de plus en plus fort, de plus en plus proches, dans une illumination d'éclairs jaillissant de toutes parts. Encore une nuit où on se sent bien au port ! Je crois que nous avons quitté Majorque à temps…En cet instant, nous entendons claquer, clochettes annonciatrices, les premières drisses. Le vent souffle et monte dans les aigus, le clapot s'est levé dans le port, les vaguelettes silencieuses tout à l'heure, viennent maintenant frapper la coque, le bateau tire sur ses amarres. Eclairs, tonnerre… et soudaine, la rafale violente, inouïe, prolongée, inattendue et qui ne prévient pas ! En une seconde, elle vient de mettre plusieurs bateaux en travers. Des ancres chassent, l'eau court à toute vitesse, nos amarres tiennent bon. Des gens sortent, tirent sur les ancres, mettent le moteur en route pour se ré-amarrer correctement. Le coup de vent annoncé vient de se déclencher…
Il y a 5 minutes, nous lisions paisiblement. En un éclair, tout a changé… Branle-bas de combat… On s'habille, on vérifie l'amarrage, l'atmosphère paisible, est devenue sifflements du vent, gifles de pluie, clapot des vagues, grincements des cordages qui se tendent, gens qui sortent et s'interpellent, gréements qui vibrent, bateaux qui souffrent sous le coup de vent…

Mardi 24 août
Balade, baignade et cuisine à bord…
Les enfants se sont baignés deux fois, Olivier s'est trouvé une copine de son âge pour jouer au sable. Ensuite, nous sommes montés sur les hauteurs dominant la ville, le port et les rochers rouges qui forment de petites anses au bord de l'eau. C'était un beau paysage, manquant hélas de soleil, car depuis samedi, le ciel est couvert.
Pour la suite du voyage, nous avons prévu deux journées de navigation jusqu'à Saint Cyprien, 20 milles demain et 44 milles jeudi…

Mercredi 25 août
Grande étape vers le nord, avec escale à midi dans une charmante crique, Tamariu, où nous jetons l'ancre au milieu de rochers rougeâtres et où les enfants se baignent à loisir.
Dans la soirée, nous parcourons la ville d'El Estartit, de petites rues piétonnes animent le cœur de la cité. De nombreuses terrasses de café regardent le port, et quantité de boutiques offrent leurs trésors aux passants… broderies, cuir travaillé à la main, jouets, souvenirs, plâtres décorés, poteries, liqueurs… En musique de fond, à la terrasse d'un hôtel, un orchestre joue infatigablement pour les clients attablés dans le jardin…

Jeudi 26 août
Nous voilà partis pour une étape de 44 milles qui doit nous ramener à Saint Cyprien… La mer est calme… les enfants jouent… Le vent nous envoie un souffle et finit par s'établir au sud, juste derrière le bateau. La grand voile et le foc sont envoyés, puis le foc est de nouveau amené, car le bateau marche assez vite même sans lui.
Sur la mer plate se lèvent des rides qui deviennent vaguelettes. Le vent souffle bien… force 4 ou 5 ? De l'arrière, difficile de juger, car il nous pousse sans nous frapper de plein fouet. Nous annulons l'escale prévue à midi, et avalons à la hâte quelques bouchées, car nous voulons en finir au plus vite. En effet, comment savoir si le vent et la mer conjuguant leurs efforts, vont bientôt s'essouffler ou au contraire continuer de forcir ?
Or, les petites vagues, amusantes grimaces de la mer, qui lui donnent un visage plus expressif que lorsqu'elle est d'huile, vont peu à peu prendre force et hauteur, et le vent atteindre 5 à 6 Beaufort. Elles commencent, cavaliers pressés par se poursuivre très près l'une de l'autre à grande vitesse, sans creuser la mer. C'est très agréable, elles se relaient pour maintenir le bateau toujours en haut de la vague, il ne retombe jamais dans un trou… 4 nœuds… 5 nœuds… 6 nœuds… On dirait que les vagues bien formées maintenant, grandissent encore ! Au passage du Cap Bear, je filme, je photographie, en surveillant la bôme qui a déjà, par deux fois, traversé le cockpit, à cause de deux empannages involontaires. De grosses vagues arrivent de l'arrière, glissent sous le bateau, en l'entraînant dans des surfs vertigineux… 7,5 nœuds… 8 nœuds… c'est le record – provisoire – de vitesse jamais atteint par notre Cap Sounion. Maintenant, des moutons courent partout, crêtes blanches sur une mer grise aux reflets d'argent, comme nous ne l'avions pas encore vue. Le ciel est gris sans soleil… Les vagues soulèvent toujours le bateau, et certaines déferlent en bouillonnant contre ses flancs. Telle une bête, il obéit à la main qui le conduit, pliant l'échine docilement sous les coups de boutoir que lui envoie la mer puis se redressant fièrement. C'est ainsi qu'il file vers son but, plongeant quelquefois dans l'eau jusqu'au plat-bord. Les enfants se sont endormis après leur deuxième paquet de biscuits… Voilà Banyuls… Port Vendres… Saint Cyprien est en vue… Quand les crêtes grises des vagues retombent, c'est une palette de couleurs qu'elles nous offrent. Sous l'écume blanche, le gris devient bleu, vert-émeraude, et en arrière de la vague, c'est tout transparent comme de la glace; on ne peut pas avec des mots, raconter les vagues et la mer… même les photos ne la restituent pas dans toute sa grandeur ! Pendant ce temps, les vagues attaquent l'arrière et le flanc droit… Il faut négocier avec cette Méditerranée au caractère virevoltant. Cette fois, un surf nous entraîne dans une course puissante, nous volons sur l'eau, dans un vacarme liquide, notre sillage s'étire… Le loch vient d'atteindre les 9 nœuds… Quelle sensation ! Peu à peu, le vent va tomber… Collioure apparaît sur notre gauche, et enfin la digue de Saint Cyprien… Quand nous entrons dans le port, il n'y a plus un souffle… Le coup de torchon vient juste de se terminer…
Le bateau amarré, nous fonçons à pied pour attraper le dernier car pour Perpignan, puis le taxi jusqu'à Rivesaltes où nous récupérons voiture et remorque…

Vendredi 27 août
Notre voiture récupérée, nous organisons une grande excursion en Andorre, jusqu'à Andorra la vella. Les montagnes sont majestueuses. Hélas, le temps est bouché, il pleut sans arrêt, nous traversons des nuages et à mon grand regret, je ne peux prendre aucune photo.
Sur les flancs des montagnes, l'eau ruisselle en filets ou en cascades, mais partout l'eau s'écoule. Nous qui avons eu tant de mal à nous en procurer depuis un mois, nous n'en revenons pas. Le paysage en Andorre est impressionnant, malheureusement, le temps était trop sombre et la pluie inondait tout, rues et promeneurs… Le soir, nous avons dîné dans un restaurant à Bourg Madame, à la frontière espagnole. Nous sommes rentrés au bateau à une heure du matin, après avoir visité de nuit une cité médiévale: Villefranche en Conflent. L'endroit nous a beaucoup plu et nous décidons d'y retourner demain au grand jour, si le soleil est revenu.
C'est notre dernière nuit sur l'eau, demain nous mettons le voilier sur la remorque…
Le temps est maussade, il pleut et il fait froid !

Dessin original

Samedi 28 août
Cette fois, c'est vraiment la fin ! Le bateau démâté s'élève doucement sous la grue, puis vient se poser en douceur sur la remorque. Il va maintenant se reposer à son tour. Finies les luttes acharnées contre les vagues, contre le vent ! Mais ne va-t-il pas s'ennuyer un peu sur la terre ?
Vers 13 heures, nous abandonnons notre Cap Sounion sur sa remorque pour retourner à Villefranche. Et franchement, nous ne le regrettons pas. La ville du moyen-âge est restée telle quelle, parfaitement conservée: étroites venelles, enseignes en fer forgé représentant boutiques ou métiers, portails d'époque, lourdes portes de la ville avec leurs chaînes, outils pour travailler la vigne, cadran solaire et sa correction, écussons sur les murs, remparts, murailles percées de meurtrières, souterrains, tours de guet, tous ces vestiges demeurent fidèles témoins d'un passé moyenâgeux.
Nous sommes émerveillés d'avoir pu vivre un moment dans cette ville d'un autre temps.
Vers 17 heures, nous prenons la route de Collioure: 40 km de routes sinueuses et étroites au pied du pic Canigou.
Collioure est une charmante ville. Un minuscule port de pêche, un clocher d'église typique de la région, et un château royal se dressent au bord de la mer. Derrière, nous découvrons des ruelles étroites abondamment fleuries et d'un calme étrange. A cette heure, il est 19 heures, il y fait frais; c'est très agréable de se promener paisiblement au milieu des fleurs et des plantes. Ensuite, Olivier et Vincent se baignent un moment, avant que nous ne nous dirigions vers Argelès. La ville n'a rien de bien attrayant. En revanche, Argelès-plage, fort animée, attire notre attention et nous descendons de voiture. Un quartier entier de restaurants, crêperies, cafés, brasseries… Nous nous laissons aller à regarder les menus: couscous tunisien, repas-crêpes, poissons divers… Nous sommes tentés par tout cela ! Finalement, Jean Paul propose: "Allez, c'est le dernier soir, on s'offre le grand plateau de fruits de mer royal à 75 francs". Je me laisse séduire par la proposition, et le plateau nous ravit : moules, huîtres, clams, gambas, langoustines, demi-langouste, escargots de mer, le tout au vin blanc.
A la fin du repas, Vincent réussit à nous faire commander des grandes glaces en coupes, décorées de petits parapluies. Il en avait tellement envie depuis le début du repas de ces parapluies ! Quant à nous, c'est la glace qui nous plaît, elle est délicieuse et fort bien décorée. Maintenant, au son lointain d'un orchestre qui joue dans Saint Cyprien, je vais me coucher comme mes trois hommes qui dorment déjà. Nous sommes haut perchés, ce soir sur la remorque ! Pas de risque de mer agitée !!!


Dimanche 29 août
Nous quittons Saint Cyprien à 10 h 30, après avoir réparé un pneu crevé sur la 504. Aujourd'hui, nous n'allons pas remonter directement, nous prenons notre temps. Nous longeons la mer à droite, et les étangs à gauche. Nous apercevons les pyramides de la Grande Motte, nous découvrons la jolie ville de Sète et son port, Frontignan et son muscat. A Aigues Mortes, nous descendons de voiture pour nous promener dans les ruelles, nous rafraîchir au café, et faire quelques achats. Le site est agréable. Vincent aimerait comme à Villefranche, visiter les remparts, mais nous n'en avons pas le temps. Ensuite, nous traversons la Camargue. A part quelques flamants roses, divers oiseaux, et des chevaux rassemblés dans les mas, nous ne voyons pas beaucoup d'animaux sauvages. S'il reste encore des troupeaux de chevaux en liberté, ils doivent vivre au cœur de la Camargue, dans les marais. C'est un paysage de roseaux, de joncs, d'herbes de toutes sortes, de touffes au ras du sol, et d'eau. Sans doute aurait-il fallu, comme le proposent certaines affiches, visiter le marais à cheval… Dans la soirée, après le repas, nous traversons, Montpellier et nous nous arrêtons ensuite pour dormir.

lundi 30 août
Nous roulons toute la journée. A midi, repas sous un parasol près d'une "baraque à frites". Le soir, nous mangeons dans un restaurant à 80 km de Paris. Nous arrivons à la maison à 2h30 du matin…

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