Mercredi 11 août
Grande journée à Cala Covas, passée à
explorer une grotte avec l'annexe, à parcourir à
pied les petites sentes qui sillonnent les flancs de la montagne
et mènent aux trous de rochers, autrefois habités
par des troglodytes. L'endroit n'est pas accessible par la terre…
Ensuite, munis de palmes et masques, nous avons admiré
les fonds superbes, suivi des yeux de jolis poissons exotiques
et réalisé une cueillette d'oursins que nous avons
rejetés ensuite, pour leur laisser une chance de grossir,
car ils étaient trop petits…
Dans la soirée, je suis allée laver du linge près
d'une petite source surgissant sous un rocher au ras de la mer…
Et maintenant, nuit tombée, tandis que j'écris
ces quelques lignes, s'élève un chant espagnol.
Ce sont deux pêcheurs de l'endroit qui s'accompagnant
à la guitare, font vibrer l'air de leur voix mélodieuse,
en une mélopée mélancolique… Je m'arrête
d'écrire pour mieux goûter cet instant…
Jeudi 12 août
Nous avons quitté Cala Covas ce matin, pour faire du
ravitaillement à Cala n' Porter. Après la crique
sauvage et inhabitée, nous avons découvert la
crique "balnéaire", pleine de monde, mais dont
les constructions hôtelières s'inscrivent assez
bien dans le décor de roches, peut-être à
cause de leur blancheur… Dans l'après midi, nous
avons gagné Cala Galdana, magnifique plage de sable blanc
chaud. L'eau était tiède, c'était un plaisir
de s'y prélasser. Vincent sait maintenant nager avec
palmes et masques.
Il a réussi à regagner, en partant de la plage,
le bateau ancré à une petite centaine de mètres
de la terre… Quant à Olivier, il barbote comme
un canard, se jette dans l'eau, court à quatre pattes
dans les vagues, et plonge même la tête sous l'eau.
Le temps est splendide, la nuit nous enveloppe maintenant, et
toute la baie est envahie par la musique…
Vendredi 13 août
Cala Turqueta est une jolie petite crique, plage de sable blanc,
pinède alentour, rochers percés de grottes. Ce
fut notre escale du matin. Quel plaisir de nager dans une eau
aussi limpide ! Olivier lui-même avec sa bouée-cygne
se laissait flotter au gré de l'onde claire.
Notre seconde escale fut Ciudadela : une petite ville toute
blanche aux rues en escaliers, des restaurants qui occupent
toute la largeur des quais, au pied des bateaux alignés
bord à bord. Le port est petit et surpeuplé. Il
nous a fallu attendre une heure pour avoir 22 malheureux litres
d'eau. Il est vrai que le bateau précédent remplissait
ses réservoirs de 1400 litres. Beaucoup de bateaux attendaient
leur tour. Ensuite nous avons dû changer deux fois de
place, avant de pouvoir quitter le bord, pour une promenade
à travers les ruelles tortueuses de la ville. Il faisait
très chaud…
Samedi 14 août
Cet après-midi, nous avons pris le car pour aller à
Ferrerrias, ville de l'intérieur, ce qui nous a permis
de voir le vrai visage de Minorque : murets en pierres superposées,
champs arides et secs, sobres maisons blanches, écrasées
de chaleur, et au milieu des champs de pierres, anciennes constructions
préhistoriques. Ce sont les restes d'une civilisation
disparue, que les Minorquais ont su laisser en place pour les
faire témoigner d'un lointain passé. Les "taulas"
étaient-ils des autels pour les sacrifices ? Les "talayots"
servaient-ils de tour de guet ? Grottes troglodytes, chambres
mortuaires, taulas, talayots, autant de vestiges d'un mystérieux
autrefois, que cette île se plaît à nous
laisser deviner…
Dimanche 15 août
A Alayor, à l'intérieur de Minorque, c'est la
fête. Nous partons le matin en autocar. La foule parcourt
les rues, sur la place les gens attendent. Nous attendons aussi
et soudain ils arrivent, un par un…les chevaux…
Le cheval et son cavalier fendent la foule, et brusquement l'animal
se dresse sur ses pattes de derrière tandis que la foule
crie "ollé" ! Des garçons poursuivent
le cheval, s'accrochent à lui, et de nouveau il se cabre.
Ce jeu a lieu au milieu d'une foule serrée qui s'écarte
lorsqu'il retombe au sol. La musique bat son plein et cette
joute va durer 2 heures et quart sous un soleil brûlant…
Le soir, nous assistons à des danses folkloriques. Enfin,
nous admirerons le défilé de chars fleuris, sous
une pluie de confettis. La fête va sans doute continuer
avec le bal, mais nous devons rentrer par le car de 23 heures.
Il est déjà 22 h 20, nous nous asseyons à
l'intérieur, et nous attendrons le départ jusqu'à
… minuit. Les espagnols ne sont pas à une heure
près !
Lundi 16 août
Nous levons l'ancre pour nous rendre à la baie de Fornells
où se trouve un village de pêcheurs. Il y a environ
25 milles et nous avons mis à peu près 5 heures
pour les faire. Le bateau filait de 5 à 6 nœuds
presque tout le temps. Un bon vent soufflait sur une mer peu
agitée. Partis sous grand voile seule à un ris,
nous hissâmes le foc un peu plus loin, puis il fallut
larguer le ris, échanger le foc contre le génois,
pour finir avec la grand voile seule, car le grand génois
couchait le bateau dans les rafales.
Fornells : Peu de ressources au port : la boucherie est à
8 km de là, la boulangerie est installée dans
une maison particulière, quelques petites épiceries
et beaucoup de restaurants… Nous y avons dégusté
d'excellents cigalas, grandes langoustines à la Mahonesa
(mayonnaise de Mahon), aux herbes et à l'ail pilé.
Mardi 17 août
Grande journée nature, sur l'île de Sargantana
que nous avons abordée en annexe vers midi… quelques
ruines, une terre brûlée, des quantités
de lézards qui filent à toute vitesse…
Vers 17 heures, nous tentons de gagner une crique à l'ouest…
Mais le vent en plein sur le nez, voile arisée, les vagues
chargées d'écume brisant sur les rochers de la
passe, notre tentative tourne court, nous ne voulons pas prendre
le risque de quitter l'abri par ce temps… Mouillage donc
près d'une jolie petite plage de sable. Et nous voilà
partis tous les quatre, à la nage au dessus des herbiers,
Olivier avec sa bouée et nous trois avec masques et palmes…
Herbes, jeunes pousses vertes, poissons nombreux rayés,
tachetés ou blancs comme le sable, de tailles diverses,
depuis les alevins, jusqu'aux poissons plus gros que la main,
nageant esseulés ou en bancs, un aquarium géant,
dans lequel on aime se glisser silencieux, sans trop agiter
les palmes pour ne pas déranger… tandis que des
poissons plats glissent en bancs, puis se couchent, éclairs
argentés sous le soleil qui pénètre jusque
là…
Plus tard, nous grimpons dans les collines, longtemps, en suivant
un sentier rocailleux. Des plantes de tous les verts possibles
y poussent. Des lézards encore... un coq sauvage... plus
haut de paisibles chèvres sauvages, noires ou brunes,
broutent les chardons, mais s'enfuient en une volée de
sabots à notre approche. Tout en haut de la lande rocailleuse,
nous découvrons deux vieux canons pointés vers
la mer. Ils ont dû veiller sur l'île autrefois…
Un peu à l'ouest, un cargo échoué se dessine
nettement, il attend que la mer, petit à petit, le réduise
à néant.
Au cours de la descente, des chauves-souris viennent frayer
au dessus de nous, tandis que le ciel se pare de rose et de
gris fondus l'un dans l'autre. Au loin, le village de Fornells
allume ses feux. La baie nous apparaît comme une carte
aux contours bien nets. A l'est et à l'ouest, se découpent
tour à tour, bandes de terre et langues d'eau évoquant
un paysage hanté et mystérieux. Notre retour en
annexe, sur une eau rose, aux reflets miroitants, termine cette
petite expédition dans un bruit de vagues toujours renouvelées…
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