Dimanche 6
San Stefano. Bonjour l'accueil !
- "Allez en face !
- où, en face ?
- En face ! Pas ici !"
On dirait bien qu'en face, c'est Talamone, là d'où
nous arrivons justement. Nous tournons dans le port, vaste plan
d'eau à peine doté de quelques pontons, pendant
une demi-heure, avant de nous amarrer sous la grue, sans eau
ni électricité. En espérant ne pas être
délogés d'ici peu. Le manque de courant ne nous
gêne que pour le frigo que nous devons faire marcher au
gaz dans ce cas. Quant à l'eau, on va la chercher dans
la ville ! Ensuite, nous essayons d'aller faire des courses,
pour approvisionner le bateau, avant de nous rendre dans les
îles. Zut, on est dimanche… C'est fermé !
Nous trouvons quand même des poissonneries ouvertes sur
le quai (c'est plein de chalutiers ici) pour faire l'emplette
d'une dorade et de grosses crevettes roses crues. On verra demain
pour les provisions, si on est encore là !
Cet après-midi, meeting aérien au dessus du port.
Après quelques démonstrations d'hélicoptères
et petits avions, survient la patrouille militaire d'Italie.
Superbes figures des neuf avions qui volent de concert, tandis
qu'un dixième (le fou de la bande) pique vers la mer,
fait la feuille morte et se cabre dans le ciel. Epoustouflant
! Pendant ce temps, les neuf autres lâchent des fumées
multicolores et se croisent et d'entrecroisent. Nous sommes
aux premières loges !
La nuit est tombée, un petit vent rafraîchit le
bateau. Demain, nous allons nous lever tôt pour faire
des courses, et rapporter de l'eau. Mieux vaut partir avec les
réserves pleines parce que dans ce coin les ports sont
mal équipés ou saturés. Et pas de chance,
notre jerrycan de 10 litres est percé. Il nous reste
donc pour l'eau à boire, trois bidons de 5 litres et
6 bouteilles, et pour la toilette, la cuisson et le nettoyage,
une réserve de 50 litres. Dans ces conditions, il faut
être économe, surtout qu'on boit beaucoup !
Lundi 7
Levés de bonne heure comme prévu, nous partons
ensuite pour l'île de Giglio. Le port est minuscule, mais
nous arrivons à trouver une place. Peu après,
un voilier italien dont le moteur semble en panne, vient accoster
près de nous, à la place de la vedette de plongée
locale.
Résultat ? Quand la vedette rentre vers 14 h , c'est
nous qu'on déloge pour que l'Italien se mette à
notre place et libère ainsi le poste du bateau de plongée.
Et nous, on n'a plus qu'à aller au mouillage, balancé,
balancé, balancé, et on n'a même pas eu
le temps de voir le village. La nuit tombe sur les roches tourmentées
qui ressemblent à celles des Lavezzi. La lune, pleine,
s'est levée, le roulis s'est atténué.
Mardi 8
Atténué le roulis !
Que disais-je ? Pas longtemps en tous cas !
Alors, on a dansé la gigue, toute la nuit. Après
cette nuit en mer (nuit d'enfer, pas dormi, fatiguée
d'être ballottée), nous avons repris la route.
Vent de face, ça tape, ça mouille, ça éclabousse.
Après cette étape (et tape,
et tape dans les vagues), nous arrivons en vue du port. Toutes
les vedettes sortent, il est 12 h 30. Nous tombons dans un chaudron
de sorcière. Il faut se cramponner, et douche, et cogne,
et tombe dans les creux. Fatiguant!
Le port de Porto Ercole ? Comme tous les autres… Personne
à l'accueil, pas de place pour les visiteurs, ou plutôt
si, une place en travers des chaînes de mouillage près
de l'entrée là où ça remue bien.
Avec toutes les chances de coincer l'ancre dans un des mouillages
de fond ! Nous repartons pour la marina, juste à côté.
Calme ! Ouf ! Chère…très chère…
Mais pouce ! On se pose là deux jours.
Grande lessive… Nous lavons toutes les enveloppes des
coussins. Je rajoute un tapis de mousse de 1 cm d'épaisseur
environ à tous les coussins du salon, qui se sont écrasés
depuis le temps qu'on les utilise. Nous rinçons le bateau
tout salé. Nous profitons de l'eau en abondance (finies
les économies !) et remplissons toutes nos réserves.
Ce soir, un gros orage de vent est passé sur le port.
En quelques minutes, il a forci, forci, puis s'est calmé.
Tonnerre, éclairs, on est bien à l'abri.
Mercredi 9
Nous nous rendons à Porto Ercole par un petit sentier
sur la colline. Nous grimpons dans la vieille ville jusqu'au
fort qui domine la baie. La vue est belle, qui découvre
le port et plus loin la presqu'île d'Argentario. Il ne
fait pas trop chaud, et c'est agréable de marcher de
ce temps-là. Au retour, nous faisons les courses au supermarché
(Coop, comme d'habitude).
Après-midi relax ! Je finis de laver le rideau et un
dernier coussin. Puis lecture à l'ombre de la toile bleue
et occupations diverses.
Jeudi 10
Départ de Porto Ercole vers 14 h et…retour après
6 milles. Le vent trop fort (30 noeuds de face) dès l'extrémité
de la pointe atteinte, nous a fait rebrousser chemin. Nous avons
mouillé deux heures dans une anse pour voir s'il allait
tomber. Finalement, après être retournés
observer le cap de près, nous avons renoncé à
nous rendre à Giannutri. Nous mouillons l'ancre au beau
milieu du vieux port de Porto Ercole. Etonnant ! Les bateaux
rentrent par dizaines, ça n'arrête pas, une vraie
autoroute, et nous sommes au milieu de tout ça. Bientôt
le calme revient. La nuit tombe. Tout autour, les lumières
s'allument, le fort sur la colline s'illumine, la lune monte,
rousse, dans l'obscurité paisible.
Vendredi 11
Nouvel essai en direction de Giannutri, ça avait bien
commencé. Bon vent de travers, on volait presque. 6,4
nœuds au mieux ! Bon, Jean Paul a pensé qu'on ne
serait pas abrité sur l'île avec ce vent de sud-est
et on a fait demi-tour. Mouillage… Fort agité ce
mouillage… Marre du roulis ! Le vent a tourné,
nous repartons vers Giannutri. Il a si bien tourné qu'il
est pile devant et qu'on s'en prend plein la tête. Re-demi-tour
! Cette fois, on se dirige vers le port de San Stefano. A peine
amarrés au débarcadère du vieux port (un
quai dans une baie sans aucune protection, et vas-y que ça
danse, que ça saute, et que ça remue), un type
vient nous dire qu'ici c'est pour les gros bateaux, et que la
nuit coûte 127 euros. Il nous a bien regardés,
lui, avec nos malheureux 6,60 m. de voilier !
Allez, nous repartons vers le port fermé (où nous
étions l'autre jour) et que nous savons plein. Mais qui
ne risque rien n'a rien ! Au premier ponton, on ne peut nous
accueillir, c'est privé. On nous indique un quai (celui
de l'autre jour). Nous nous amarrons, nous dressons la toile
bleue, nous commençons à bricoler. Et, arrive
un bateau, c'est sa place. Nous re-déménagons.
Cette fois, nous glissons Cap Sounion (2,50 m de large au maître
bau) dans un trou de 1 m de large entre deux bateaux. Là,
au moins, on ne va pas nous dire que c'est la place d'un autre.
Pas besoin de dire, qu'il a fallu jouer des coudes pour se glisser
dans ce trou de souris. Enfin, on est bien calé, et les
pare-battage grincent. Pour descendre sur le quai (très
haut), c'est une vraie acrobatie. Enfin, comme ça fait
deux jours qu'on n'avait pas mis le pied à terre, ça
nous défoule.
Samedi 12
Bon, cette fois, on n'est même pas sorti. Giannutri était
pile dans le vent. Courses, nettoyage du bateau, grande balade
jusqu'à l'extrémité de la baie, à
l'autre bout de la ville…
Dimanche 13
Giannutri, enfin… La météo annonçait
du vent de nord-ouest, ce fut du sud-ouest; au lieu de l'avoir
derrière, nous l'avons eu devant, mais ça n'a
pas mouillé, à peine quelques embruns. J'ai pu
lire, bien calée sous le vent de la voile qu'on hisse
toujours, même au moteur, pour gîter le bateau.
C'est plus confortable. Le voilier filait, le vent était
froid, et on sentait la puissance de la mer sous la coque.
A Giannutri, nous avons débarqué en annexe et
marché dans la lande chaude. Les ruines romaines de la
casa Domitia étaient en travaux, on n'a pas pu les voir.
Dans la baie, deux ou trois bateaux étaient ancrés
ensemble, sur lesquels une vingtaine de jeunes dansaient. Boum
en plein air "I will survive". C'est vrai qu'ils ont
gagné la coupe du monde de foot (à nos dépens).
Ils chantaient comme nous chantions en 1998.
Le soir est venu, les bateaux à moteur sont tous partis.
Seuls, restent quelques voiliers. Cap Sounion commence son roulis
habituel au mouillage, quand le vent tombe et qu'il est livré
aux vagues résiduelles. On a fini la soirée en
se faisant du pain perdu. Hum !
Et maintenant, on va danser toute la nuit, et mal dormir, en
espérant toujours que le roulis finira pas s'arrêter.
Lundi 14
Mais le roulis a continué, s'est amplifié…
On a en rarement eu autant. On a failli déménager
à 4 h 40, mais je préférais attendre le
jour. J'ai dû m'endormir vers 5 h, alors que les secousses
étaient moins violentes. Vers 10 h , nous avons été
réveillés par de nouveaux coups de boutoir, le
vent avait encore tourné. Nous avons déjeuné
vite fait, et levé l'ancre, le vent étant bien
orienté pour partir. Nous avons fait la moitié
de l'étape avec le vent derrière. Soudain, il
s'est arrêté net, et est passé devant. Nous
avons mis le moteur jusqu'à Talamone, et repris la même
place que l'autre jour, dans le coin de port sans eau ni électricité,
pour éviter qu'on nous dise que le port était
complet.
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