Samedi 14 mai
Ce matin, nous allons acheter un fromage de chèvre à
la ferme qui nous accueille, nous en profitons pour bavarder
longuement avec les fermiers sympathiques... Jardinage, nature,
écologie... Lui, il ramasse les escargots de Bourgogne
qui restent dans la région et les dépose dans
la colline derrière chez lui, pour qu'ils ne soient pas
écrasés sur le chemin. Il en a deux dans les mains.
Elle, elle laisse les orties le long d'un bâtiment parce
que les "Bourgogne" devenus rares, aiment s'y réfugier.
Dans la région, le ramassage des escargots vendus assez
cher aux restaurants, les a presque tous fait disparaître.
Ils élèvent moutons et chèvres, possèdent
huit chiens pour la garde des moutons, la chasse ou la compagnie,
et plusieurs chats. Ils nous montrent leur jardin et dans une
grande serre, melons, aubergines, poivrons, tomates, fèves,
salades...
Ensuite, nous nous rendons au marché de Castellane, pour
acheter divers fromages de la région. Après le
déjeuner, sous un ciel encombré, mais où
percent quand même quelques plaques de bleu, nous partons
pour la rive sud du Verdon. Nous voici repartis en sauts de
puce, de point de vue en point de vue. Balcon de la Mescla,
superbe vue sur le méandre vert d'eau qui ceinture un
gros rocher couvert de végétation. Le soleil nous
fait des clins d'oeil, une chance pour les photos.
Quand nous arrivons sur Aiguines, la fin de
la rive gauche, un gros orage éclate nous privant de
lumière et surtout déversant des cataractes et
des grêlons. Nous nous arrêtons un moment à
vue du lac de Sainte Croix en espérant une éclaircie
!
Finalement la pluie s'arrête et une fois arrivés
à Aiguines, au lieu de rentrer par Moustiers, nous décidons
de suivre un chemin buissonnier qui passe par Vérignon,
situé au milieu de belles forêts; Ampus, village
aux rues étroites, bordées de hautes maisons en
pierre de pays et fleuries; Château double, bourgade accrochée
à la montagne au-dessus d'une profonde gorge au fond
de laquelle coule La Nartuby; et enfin Combs-sur-Artuby pour
un petit goûter à l'unique boulangerie de l'endroit.
C'est plus long, mais comme nous sommes partis de la ferme à
midi trente, il n'est pas tard et nous avons du temps devant
nous.
Une minuscule route passant par Le Bourguet nous ramène
à Castellane. Etroite, elle sinue entre les genêts,
les montagnes abruptes, les sapins et épouse le défilé
du Jabron, minuscule ruisseau caché sous la végétation.
Dimanche 15 mai
Grand bleu ce matin et vent fort qui a chassé tous les
nuages ! Tous nos documents sont étalés sur la
table et nous cherchons une excursion pour aujourd'hui. Avec
ce soleil, l'idée s'impose rapidement, nous allons partir
vers Grasse puis la Méditerranée et longer la
corniche de l'Esterel, un minimum de 300 km mais peu importe.
Nous partons à 10h30.
Après une zone orageuse sur Grasse, nous retrouvons le
soleil à Nice, la mer est superbe, émeraude au
long de la promenade aux Anglais, bleu sombre au large. Nous
garons la voiture près du port de Nice où nous
nous étions amarrés il y a quelques années
avec Cap Sounion et déjeunons, dans un restaurant sur
les quais, d'un splendide repas (salade de fruits de mer, paëlla,
tiramisu).
Nous reprenons la virée par la corniche
basse qui passe au ras de la mer. Après Nice, voici Villefranche
et sa rade magnifique, murs couverts de bougainvillées
rouges, agaves géantes, oiseaux de paradis, Saint Jean
Cap Ferrat et son cap, daturas couverts de leurs grosses cloches
blanches, Beaulieu et ses rosiers grimpants accrochés
aux troncs des palmiers, ses fleurs exotiques comme à
Madère
ou Tenerife,
sa falaise dressée comme une sentinelles sur le port,
Eze sur Mer encastrée entre les montagnes, Cap d'Ail,
Monaco, le rocher, Monte Carlo et son casino, ses demeures aux
façades ouvragées.
Un orage passe sur la principauté, une grosse averse
arrose Roquebrune, la mer grisaille, les lointains s'estompent...
Menton... La pluie s'est arrêtée, mais nous avons
perdu le bleu du ciel. Cela ne nous empêche pas d'aller
faire un tour à pied dans la ville haute, avant de rebrousser
chemin, pour rentrer par la haute corniche.
A Roquebrune, petit village agrippé
au-dessus de la mer et dominé par un château médiéval,
nous montons jusqu'à l'olivier bimillénaire au
tronc noueux divisé en plusieurs branches. Au débouché
des calades, la vue porte, au-delà de la mer, jusqu'au
rocher de Monaco.
La corniche haute permet d'admirer tour à tour, Monte
Carlo, Saint Jean Cap Ferrat, Villefranche, Nice, comme d'un
avion. La mer et le ciel ayant retrouvé leur bleu beau
temps, les panoramas sont superbes. Sur la route du retour,
jusqu'à Grasse et au col de Faye (984 m), on découvre
au loin la mer et face à Cannes, les îles de Lérins.
Nous rentrons à 21 heures à la caravane après
un périple de 306 km.
Lundi 16 mai
Depuis une heure nous grimpons sur un chemin rocailleux, sous
un ciel azuréen. C'est ce bleu magnifique qui nous a
attiré vers la colline pour une marche au milieu des
buis, des genêts, des lavandes et du thym. Après
avoir croisé un berger, ses moutons et trois chiens,
après avoir bavardé un moment avec lui, nous avons
atteint un endroit assez élevé pour découvrir
sur notre droite Castellane et sur la gauche le lac de Castillon
d'un bleu extraordinaire. Nous voilà donc assis à
regarder ce paysage silencieux et chaud, sentant bon la garrigue.
Ecraser entre les doigts, le feuillage de la lavande ou un brin
de thym et les senteurs nous enveloppent. Nous redescendons
pour midi à la caravane et déjeunons à
l'ombre d'un arbre.
A 14 heures, nous partons en voiture, pour
le circuit de découverte des cadrans solaires, prétexte
à découvrir le patrimoine local.
Sur chaque cadran figurent les symboles de la localité.
Créés depuis 2007, ces cadrans sont le fruit de
l'imagination de cinq artistes, sur des thèmes choisis
en concertation avec les habitants. Certains cadrans sont orientaux
(ils ne disent l'heure que le matin), d'autres occidentaux (que
l'après-midi), d'autres méridionaux (toute la
journée).
Voir l'itinéraire
des cadrans, les photos et la traduction des dictons.
Dès le départ, le lac de Castillon
nous éclabousse de couleur. On dirait la mer des Caraïbes
! Le cadran du barrage, monumental (le plus grand du monde)
a été dessiné en 2009, sur la muraille
qui retient les eaux. Il n'est pas doté d'un gnomon (aiguille
centrale) mais c'est l'ombre de la corniche en encorbellement
couronnant le barrage qui détermine l'heure, au point
où elle rencontre les courbes horaires.
Dicton : "L'énergie se
renouvelle avec le temps."
Nous longeons le lac...
Saint Julien du Verdon... Le cadran se trouve sur la façade
sud de l'ancien presbytère au terme d'une grimpette qui
permet de découvrir le lac dans toute sa beauté.
Un dicton en provençal y est inscrit :
"Senso tu, sieu ren."
Angles... Au milieu de village, un joli lavoir
cascade une eau fraîche de bac en bac. A quelques pas
le cadran "Lou tems passo leu,
passo lou ben."décore la façade
sud-ouest de l'église.
Saint André des Alpes... Dessiné sur le mur sud
de l'école, le cadran est un peu difficile à trouver,
le bourg étant plus grand. Mais de lavoir en fontaine,
nous arrivons à le dénicher. "Fai
toun camin, badau l'ouro passo."dit celui-ci.
A l'office du tourisme où je suis allée demander
la traduction des dictons, la dame me propose d'essayer de trouver
un document à ce sujet et de me l'envoyer par email,
ce qu'elle n'a pas manqué de faire.
Moriez... Au bord de la N 202, sur le mur est de l'école,
le cadran est entièrement dans l'ombre à 16 heures,
il s'agit d'un cadran oriental. Il n'en affiche pas moins le
proverbe provençal habituel, "Espero
d'aise ce qu'adus lou tems."
La Mure Argens... Tout au bout d'une rue où deux voitures
ne peuvent se croiser, le cadran, "Pren
toun tems tant qu'es enca tems.", veille sur
une placette ombragée par un platane et un tilleul embrassés,
sous lesquels quelques villageois papotent sur un banc.
La route serpente doucement entre prairies et vallons, dans
une débauche de verts de toutes les nuances, un petit
vent frais tempère la brûlure du soleil qui s'en
donne à coeur joie dans ce bleu comme on n'en voit pas
en Normandie. L'Issole, puis l'Ivoire nous accompagnent en sautant
sur les cailloux de leur lit. En cette saison sans touristes,
une grande impression de calme se dégage des villages,
des campagnes, des montagnes.
Allons... Un raidillon conduit à un vieux banc en bois
accoté à une borne-fontaine, comme il y en avait
une dans la rue de mon enfance, avec une manivelle sur le dessus
qu'on faisait tourner pour que jaillisse l'eau.
"Eici meis ouro fan espeli lou
bouonur." - "La vie est une chance, saisis-là."
disent les deux proverbes qui illustrent le cadran situé
sur le mur sud de l'église à l'aplomb du banc
aux teintes lavées. Quel silence ! Un peu plus bas, un
grand lavoir couvert où l'eau gicle à gros bouillons,
abrite une ancienne lessiveuse à cheminée qu'on
utilisait autrefois pour faire bouillir le linge.
Nous interrompons pour aujourd'hui notre découverte
des cadrans, car il est déjà 17 heures et il en
reste de nombreux à admirer. Comme nous ne sommes pas
très loin de Colmars, nous allons faire un détour
par le val d'Allos avant de rentrer et voir cette bourgade,
située dans le Haut Verdon.
Quant au Verdon, il suit son cours le long de la route, la bordant
sur la droite tandis que la montagne raide l'enferme sur la
gauche, laissant apparaître ici ou là de petits
bourgs entre ciel et terre.
Colmars, cité Vauban, semble quelque peu déserté
par ses habitants, maisons à vendre, volets fermés.
Peut-être s'anime-t-elle davantage en été.
Quoiqu'il en soit, il est agréable d'y flâner,
ruelles pavées, enseignes en fer forgé, hautes
maisons en pierre de pays, lourdes portes de bois, fontaines
et bornes à eau... La journée est bien avancée,
nous rentrons au camping.
Mardi 17 mai
Après une matinée lecture, bricolage, nous reprenons
à 13h45 la suite de la route du temps. Nous gagnons d'une
traite Lambruisse, où le cadran est dessiné sur
la face sud-ouest de l'église, "L'umbro
viéu qu'au lume."
Au loin, les clarines sonnent dans la montagne, les moutons
paissent l'herbe tendre, chèvres et chevreaux font tintinnabuler
leurs clochettes minuscules.
Une route étroite posée dans des champs de verdure,
eux-mêmes adossés aux versants couverts de conifères,
conduit jusqu'à Tartonne par le col du Defend (1230 m).
Sur la façade de la mairie, un cadran sans proverbe indique
l'heure solaire du lieu. Pour la convertir en heure officielle,
il faut ajouter deux heures, retirer des minutes de longitude
et appliquer une correction du temps selon la saison. Bref c'est
un peu compliqué ! Finalement, notre montre indique 15
heures alors que le gnomon marque 13h30.
Anes sur la route, chevaux dans les champs, moutons amalgamés
à l'ombre des arbres, dans un décor de paix, plats
et reliefs, nous ne nous lassons pas d'admirer le paysage en
roulant tranquillement.
A Clumanc, le cadran (sans dicton) se cache sur une haute pierre
en bordure de la D19, à proximité de l'école.
A Saint Lions, le cadran est encore une fois sur le mur sud
de l'église, tout proche du lavoir ovale couvert de tuiles
romanes, avec sa fontaine ronde qui dispense sa jolie musique
de gouttes d'eau. Autrefois actif, ce village est aujourd'hui
dépeuplé.
Dicton : "O temps suspends ton
vol et vous heures propices suspendez votre cours."
A Saint Jacques, bâti sur un éperon rocheux à
800 mètres d'altitude, le cadran, placé sur la
façade est de la mairie est oriental et n'indique donc
pas l'heure l'après-midi. Une vue superbe se découvre
jusqu'aux lointains montagneux, en passant par des touches de
vert d'une incroyable luminosité.
Barrême, doté elle aussi d'un cadran solaire "Tu
fas que pasaou sabes ben.."est une petite bourgade
sans charme, une rue principale bordée de maisons quelconques
et quelques boutiques toutes fermées. Pourtant il est
16h30, donc ni trop tôt, ni trop tard dans l'après-midi.
Nous avons quitté les routes bucoliques et nous roulons
maintenant sur une voie plus importante qui mène à
Castellane.
Senez... Sur la façade ouest de la cathédrale,
proche d'une fontaine chantante, le cadran nous fait un clin
d'oeil. Celui-là, beaucoup plus ancien que les autres,
porte des inscriptions en latin. La cathédrale romane,
s'impose, massive au milieu de ce minuscule bourg. Plus loin,
une autre fontaine et déjà on est au bout du village,
plusieurs sentiers s'échappent vers la montagne.
Blieux est perdu tout au bout d'une route tellement étroite
qu'on se félicite de ne croiser personne, profusion d'iris
de toutes les couleurs, quelques maisons et sur la face sud
de l'église, le cadran solaire, dans les tons beiges,
comme ceux de cette région, tandis que ceux du début
étaient colorés de teinte vives. Bien entendu,
nous relevons le dicton : "Quand
Mariano a lou capéu, Cuelo Basso lou mantèu, ploura
lèu."
A l'approche de Castellane, la route longe une gorge profonde,
puis après quelques courbes entre les conifères,
franchit le col des Lêques (1148 m). La descente en larges
virages, vers la ville, offre de belles échappées
sur les montagnes environnantes. Bientôt, nous sommes
en vue de Castellane et de son église perchée
sur un piton rocheux. Sur la gauche, on voit le lac de Castillon
et la ferme du Cheiron. Le cadran solaire de Castellane, sur
la face sud de l'office de tourisme annonce :
"Lou Soulèu es jamais tant
bèu, qu'un jour mounte s'encaminan."
Mercredi 18 mai
Aujourd'hui, est notre dernier jour ici... Nous feuilletons
les documents sur la région et il semble bien qu'on ait
vu tout ce qui nous intéressait dans la région.
Nous n'allons pas rester une journée à ne rien
faire. Comme j'ai emporté une sacoche de documents sur
la Provence, nous pensons que Sisteron pourrait nous plaire.
Mais comme c'est à 80 km de Castellane et surtout sur
notre route retour, nous décidons d'emmener la caravane.
Ce sera toujours autant de moins à faire pour rentrer
en Normandie.
Quelques achats au supermarché... Un bon moment à
la ferme pour acheter des fromages de chèvre et pour
bavarder encore un grand coup avec la sympathique fermière
et voilà la caravane attelée... Il est 14h45...
Quelques gouttes de pluie nous accompagnent.
A 16 heures, nous sommes au camping "Les prés hauts"
à Sisteron, un joli camping fleuri presque vide. A cette
saison, c'est vraiment agréable, le calme et l'espace.
il fait chaud, le soleil tape.
La caravane posée, nous repartons en voiture pour un
itinéraire de découverte d'environ 80 km, que
nous avons repéré sur un document touristique.
Sur la route vers Chateauneuf de Chabre, s'étendent des
kilomètres de cultures de pommiers abrités sous
d'immenses filets. C'est spectaculaire. Nous enfilons les route
des gorges de la Méouge.
D'impressionnants rochers dominent le lit du
torrent, vigies de pierre immobiles, dessinés par le
temps, ils montent la garde, les pieds au ras de l'eau. Les
strates des montagnes courent en lignes serrées, obliques,
parfois courbes, créant un décor saisissant.
Plus loin, les gorges se font val moussant de verdure, coteaux
riants, acacias en cascades blanches, genêts cramponnés
aux moindres interstices des roches ou couvrant les rondeurs
des collines. La montagne s'est toute de jaune vêtue.
Après Séderon (en Drôme provençale),
la balade nous entraîne dans la vallée du Jabron,
avec au fond la montagne de Lure, au sommet étincelant,
que nous avions vu par son versant sud en 2009, lors de notre
périple entre Forcalquier, Manosque et Banon. La route
sinue entre des versants sauvages, en suivant le Jabron, avant
de se glisser de nouveau dans l'or des genêts.
De retour à Sisteron, nous dînons dans un restaurant
créole... La patronne à la fin du repas, nous
offre un rhum arrangé ! C'est bon, mais très fort.
En tout cas, beaucoup plus que les petits rosés de Provence
que nous avons goûtés pendant ce séjour.
Jeudi 19 mai
Grand soleil et vent froid pour notre dernière flânerie.
Sisteron dominée par sa citadelle, regarde la Durance
aux eaux vertes. Nous ne nous attardons pas dans la ville dont
nous prenons quelques clichés, nous préférons
aller au marché de Laragne à 17 kilomètres
de là. Un fromager, hier, nous a conseillé d'aller
y faire un tour, d'après lui, une centaine de marchands
viendraient y vendre leurs produits locaux.
En effet, ce marché est sympa, nous y achetons des fromages
de pays et surtout un "Banon" que nous espérions
trouver, car nous ne sommes pas loin de son berceau d'origine.
Nous quittons le camping à 13h30 direction la Normandie,
traversant le Vercors aux paysages superbes, puis Grenoble.
A 21h30, nous nous arrêtons pour dîner et passer
la nuit à Lacanche 8 km avant Arnay-le-Duc; sur une aire
de pique-nique joliment aménagée sous les arbres
et cachée derrière une haie, un endroit très
sympa, qu'on essaiera de retenir pour d'autres fois vu qu'on
passe très souvent par là.
Vendredi 20 mai
Partis à 9h15, nous déjeunons dans la forêt
de Fontainebleau et nous arrivons chez nous, dans l'après-midi.
La route :
Aller jusqu'à St Martin de Vésubie : 1110 km
Sur place :1734 km
Retour à partir de Sisteron : 906 km
Total : 3750 km
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