mardi 6 mai
Le camping est calme ce matin, il n'y a plus que nous, et le
soleil est au rendez-vous. A midi trente, nous démarrons
pour un itinéraire en boucle au milieu des pics d'Europe.
L'étroite route souriante, avant de musarder dans la
montagne, épouse le relief de la côte sur quelques
kilomètres et domine la mer...
La lumière et la chaleur donnent au
paysage un petit air de liberté. Nous nous glissons dans
le défilé de la "Hermida", de profondes
gorges qui suivent le cours du rio Deva. Des abrupts fiers et
élancés surplombent la route, et le bruit cascadant
du torrent se mêle à la symphonie de Borodine qui
s'efface doucement à la fin du morceau.
Ce petit val de verdure, éclaboussé de soleil,
cache de jolis coins... chapelle perdue... route en corniche...
bastides et vieilles demeures agrippées à flanc
de montagne... Herbe tendre sur fond de sommets enneigés...
Un écureuil file devant nous, j'ai rangé le MP3.
Les cigales crissent et les oiseaux accrochent aux branches
des notes de musique...
Nous nous enfonçons au coeur des pics
d'Europe. Avant mon départ, quelqu'un m'avait demandé
de lui décrire l'Espagne cantabrique. Le portrait suggestif
que j'en brosse là, à petites touches, est très
personnel. Il oublie toute la partie balnéaire et touristique,
pour s'attarder sur des chemins de traverse où on ne
croise personne (en tout cas en mai).
Sur la petite route qui ne permet pas le croisement
de deux voitures, et qui franchit successivement les cols de
Pandetrave, Panderruedas et del Ponton, belvédères
et vues impressionnantes se succèdent dans un décor
de haute montagne, aux rochers verts de lichens. De lacet en
lacet, nous nous rapprochons du ciel, le chant des cigales a
disparu, les fleurs sauvages dispensent de fraîches senteurs.
A Pandetrave, les pics d'Europe, tourmentés, se dressent
devant nous. A Panderruedas, le belvédère se mérite,
il faut grimper un raidillon et marcher quelque peu au milieu
des fleurs sylvestres, pour embrasser d'un regard toute la vallée
encastrée entre les pics enneigés, tandis que
dans le fond riant de verdure, se blottissent quelques vieux
villages.
Après El Ponton, la route se coule dans la forêt
et descend rapidement jusqu'au défilé de "Los
Beyos". On se sent tout petit au pied de ces escarpements
rocheux, murailles impressionnantes, qui se dressent de part
et d'autre du profond sillon, dans lequel courent la route et
le "rio Sella".
En fin de journée, la boucle de notre
périple se referme par Cangas de Onis, las Arenas de
Cabrales, Panes et San Vicente. Il est 20 heures.
mercredi 7 mai
C'est l'anniversaire de Vince aujourd'hui, on lui enverra un
message ce soir. En attendant, le temps est bizarre, brume au
ras du sol au dessus de laquelle se devine le soleil car on
perçoit sa tiédeur. Nous nous mettons en route
à 12 h 45. J'avais repéré hier de belles
vues de la plage déserte à marée basse,
avec les vagues galopant sur le sable au son des cors du MP3,
et je comptais prendre le temps d'en faire quelques photos aujourd'hui,
pour réaliser une animation musicale sur mon PC, à
mon retour, mais cette brume habille le paysage d'un flou qui
a son charme, mais qui risque de ne pas rendre exactement ce
que j'escomptais du paysage. Le pire, c'est qu'à une
centaine de mètres du littoral, le ciel est bleu sans
une trace de brume ! Tant pis, nous reviendrons demain et en
attendant, nous reprenons la route d'hier, celle des gorges
"del Cares" qui va de Panes à Cangas de Onis.
J'en profite pour réécouter "Dans les steppes...",
mais aussi un morceau de piano solo "Sounds of nature"...
"Merci l'ami"... "Dreamtears nouvelle version"...
et des compos de Vince.
Nous bifurquons vers Covadonga pour atteindre les lacs d'Enol
et de la Ercina. La route est spectaculaire. Montagnes rocheuses,
sauvages et tourmentées, piquées de verdure. J'ai
coupé la musique, retour aux sons nature... Plus nous
montons, plus c'est beau ! Les couleurs, les formes, les odeurs...
Le lac Enol se dévoile soudain au détour d'un
virage, miroir dans un écrin vert... Splendide ! Au fond
la neige des hauteurs tranche sur le tendre vert des pâturages.
Ces deux lacs sont, en saison touristique,
très visités, des chemins balisés les entourent.
Mais à cette époque, il n'y a personne. Il fait
chaud sous le soleil retrouvé. Nous abandonnons la voiture
pour faire le tour du lac Enol à pied.
Cette balade champêtre, au milieu des pâquerettes,
pissenlits et autres clochettes bleues s'agrémente d'un
combat entre deux gros taureaux à l'air méchant,
qui barrent le chemin. Olivier, quand il était petit,
aurait dit "Venez vite voir, y'a de la bagarre". Nous
piquons à travers les prés pour éviter
les bêtes furieuses, non sans les avoir filmées
d'un peu plus loin. Le ciel s'est couvert. Tandis que nous observons
une pause, assis sur un rocher au dessus du lac, la pluie goutte
sur nous, un peu, pas trop... puis s'évanouit comme elle
est venue. De toutes façons, nous devons faire demi-tour,
car nous sommes devant une falaise fermée par des barbelés.
Nous avons choisi un sentier qui escalade les rochers, pour
ne pas suivre le chemin balisé (trop bien balisé)
de "monsieur tout le monde"et nous voilà dans
une voie sans issue. Demi-tour !
Sous le soleil qui joue à cache-cache avec les nuages,
le lac Enol - petit joyau émeraude - se pare de reflets
scintillants. Quelle paix ! On entend au loin les clarines des
vaches, les genêts exhalent un doux parfum... Autour du
lac, les prairies vertes, ponctuées par les taches grises
d'énormes rochers arides, montent doucement jusqu'aux
sommets étincelants. On pourrait rester à contempler
ce paysage, longtemps, longtemps !
Nous récupérons la voiture et
décidons de rentrer par un chemin buissonnier, une minuscule
route dessinée en blanc sur la carte, qui conduit à
Llanes. Et comme, finalement, une fois arrivés dans la
ville, il se met à pleuvoir, nous allons faire quelques
provisions avant de rentrer à la caravane, vers 20 h
15. Et il pleut, pleut, pleut. Pas grave, nos soirées
sont toujours paisibles, lecture et... lecture !
|