Nous continuons de rouler tandis que Hou nous
parle de l'histoire du Vietnam. Nous traversons la zone qu'on
appelait démilitarisée autrefois, et qui aujourd'hui
ressemble encore à un champ de bataille, avec ses cratères
d'obus. La végétation commence à peine
à se remettre de ce massacre.
La dioxine à Danang
A la base militaire de Danang, les Américains,
pendant la guerre du Vietnam, préparaient la Dioxine,
un herbicide destiné à défolier les
forêts, dans le but d'apercevoir les convois militaires
des communistes, venus du nord avec vivres et armes et
qui passaient dans les forêts de la chaîne
de l'Annam.
Les gens touchés par la dioxine ont subi des maladies
graves et sont porteurs d'anomalies, eux et leurs enfants.
La terre de la région a été empoisonnée
par la dioxine qui reste présente dans l’environnement
et continue à contaminer l’agriculture et
les jeunes Vietnamiens nés après la guerre.
Il y a trois mois, les Américains sont venus pour
nettoyer le sol, à l'aide de machines.
Mais il reste encore des centaines d'endroits à
assainir et de nombreux engins explosifs dans les forêts
qui causent des blessures graves quand il explosent. |
Nous nous
élevons peu à peu. En contrebas, la vue plonge
sur la mer et sur un petit village de lépreux, encore
habité par quelques malades. Nous commençons à
monter vers le col des nuages de la chaîne de l'Annam,
barrière climatique entre nord et sud, où s'accumulent
les nuages venant de l'une ou l'autre direction, selon la saison.
Il y a six ans, un tunnel (le plus long d'Asie du sud-est) a
été creusé pour désengorger la route,
maintenant surtout fréquentée par les touristes.
Nous sommes sur la route Mandarine, non loin de la piste Hô
CHi Minh qui relie le nord au sud en traversant la montagne,
le Laos et le Cambodge et qui était utilisée par
les communistes pendant la guerre.
L'histoire du Vietnam
En 1285, les Français ont envahi la citadelle de
Hué, faisant des milliers de morts, enterrés
dans des fosses communes (pouvant contenir jusqu'à
1000 morts). Pour contrôler le pays ils ont mis
à sa tête des rois fantoches établissant
un protectorat sur le Vietnam, le Laos et le Cambodge
(ancienne Indochine française) mais ils ont été
poussés dehors à la fin de la guerre mondiale
par les fascistes Japonais.
Le 2 septembre 1945, Hô CHi Minh, a déclaré
l'indépendance du Vietnam, et déplacé
la capitale de Hué à Hanoi.
Les Français ont alors voulu revenir, mais la population
s'y est opposée, et ce fut la deuxième guerre
d'Indochine qui dura de 1945 à 1954 et se termina
par la défaite de Dien Bien Phu au cours de laquelle,
les Vietnamiens avec vélos, buffles et moyens rudimentaires,
mais armés d'une force incroyable ont encerclé
à l'aide de tunnels, la cuvette où stationnait
l'armée française.
Lors des accords de Genève qui suivirent, le Vietnam
a été divisé en deux, la limite étant
le fleuve Ben Hai au 17ème parallèle, bordé
d'une zone démilitarisée de 8 km de part
et d'autre.
Le nord s'est reconstruit sous le régime démocratique,
tandis que le sud était toujours occupé
par les Français qui avaient remis sur le trône
le roi fantoche. Après le départ des Français,
ce roi a été renversé, la république
proclamée et le président élu a demandé
l'aide des Etats Unis qui sont venus au Sud Vietnam.
Les communistes du Nord ont bombardé Hué,
les Américains ont riposté. La zone démilitarisée
a été la zone la plus bombardée du
monde.
Des manifestations ayant lieu dans le monde entier, en
1973 furent signés les accords de Paris et deux
ans plus tard, le Vietnam fut réunifié.
Saigon perdant son rôle de capitale du Sud, est
devenue Hô CHi Minh Ville. |
Nous avons de la chance, la vue du col des
nuages, bien qu'un peu brumeuse, est assez claire pour qu'on
découvre la côte et les plages, car aujourd'hui
les nuages sont hauts. Nous nous arrêtons un moment pour
jeter un coup d'œil aux blockhaus qui subsistent au milieu
des boutiques de souvenirs et des marchands ambulants qui nous
assaillent.
Sur l'autre versant, comme à la montée,
la route serpente en épingles à cheveux jusqu'à
la mer.
En bas, les lagunes occupent tout l'espace. Les pêcheurs
y immergent des pneus qu'ils repèrent à l'aide
de pieux et dans lesquels ils placent des débris de nourriture
afin que les coquillages les colonisent et quelques semaines
plus tard, ils remontent les pneus pour récupérer
les coquillages. Une petite péninsule habitée
par des pêcheurs qui tendent leurs grands filets sur les
bords, déroule de belles plages dorées.
La mousson se termine et les paysans commencent
à labourer les rizières inondées pour la
prochaine récolte. Beaucoup travaillent encore avec les
buffles, mais les machines apparaissent peu à peu. Toute
la famille travaille dans les rizières, sur les petites
parcelles familiales. Au bord de la route, des alambics composés
de deux bidons, un pour bouillir les feuilles, l'autre pour
refroidir la vapeur dans les tubes, distillent de l'eucalyptus.
Des cimetières militaires, ici ou là, couvrent
le sol de leurs milliers de tombes.
Dans la lagune, circulent des barques de pêche avec leur
abri semi-circulaire, dans lequel ils vivent autant que dans
leur maison. On appelle cette lagune, la lagune des trois rivières,
à cause des multiples cours d'eau qui s'y jettent et
particulièrement trois grands dont la Rivière
des Parfums qui traverse Hué, séparant la vieille
ville de la moderne. Elle tire son nom des odeurs du riz mûr,
de la paille de riz, des herbes médicinales qui croissent
sur ses rives, du parfum de l'encens qui s'échappe des
pagodes construites sur ses bords et des bois de Santal.
Nous arrivons à Hué vers midi trente. Il a dû
pleuvoir ici car les gens sur les deux-roues arborent de grandes
capes en plastique coloré qui les recouvrent entièrement.
Mais nous en chemin, nous n'avons pas eu une goutte de pluie.
La circulation est moins dense qu'à Hanoi. Nous entrons
dans la citadelle et commençons par déjeuner au
restaurant dans un décor superbe à l'ancienne,
avec bois décorés de dorures et lampions au plafond.
Quel beau début que ce paon au corps d'ananas creusé
dans lequel brûle une bougie qui permet de tenir au chaud
les nems piqués au-dessus ! Des carottes sculptées
figurent la tête et les plumes. Tout est joli et original
ici comme la salade de figues, dans laquelle les figues réduites
en menus morceaux, mélangées à d'autres
ingrédients inconnus de nous, se posent par cuillerée
sur des galettes de riz. Depuis que nous sommes dans le centre,
les serveuses nous expliquent comment manger les plats qu'elles
apportent, comme poser une galette dans l'assiette, puis une
feuille de salade et diverses autres choses, rouler le tout
et arroser de sauce. C'est amusant !
Après déjeuner, nous pénétrons dans
la cité impériale située à l'intérieur
de la citadelle et au cœur de laquelle se cache la cité
interdite (interdite à la population et aux mandarins
et réservée au roi et à ses centaines de
femmes, eunuques et enfants). Aucun homme ne pouvait y pénétrer,
ni aucune femme en sortir. Le roi avait en général
trois favorites dont les enfants étaient en concurrence
pour lui succéder à sa mort et 100 à 500
concubines qui cohabitaient.
Nous entrons par la porte du midi, couverte de tuiles jaunes
(pour le roi) et vertes (pour les mandarins). C'est là
qu'abdiqua le 28 août 1945 le dernier roi, avant qu'Hanoi
ne devienne capitale.
De cette cité immense (40 ha), il reste un certain nombre
de bâtiments préservés des typhons, inondations
et bombardements. Un bassin grouille de carpes énormes
aux couleurs vives, bâtiments en granit, belles tuiles
Yin Yang, dragons en céramique incrustée, bois
laqué rouge incrusté de décorations en
or...
Devant chaque bâtiment se dresse un paravent,
autant destiné à contrer le vent qu'à protéger
les habitants de la vue des autres ou des mauvais esprits. Le
temple dédié aux rois s'élevant de 13,50
m, aucune construction de la citadelle ne doit excéder
cette hauteur.
Après la visite, nous nous rendons à l'hôtel
dont la vue donne directement sur la rivière aux parfums.
Nous remarquons que comme au Cambodge, il n'y a pas de mendiants
dans les rues. Par contre beaucoup de marchands ambulants nous
accrochent pour vendre. Les jeunes filles, très élégantes,
portent parfois le costume traditionnel, que nous avons déjà
admiré dans les autres régions du pays.
A 19 heures, nous nous rendons dans un restaurant à l'accueil
exceptionnel, mais très vite étouffant... On nous
avance nos chaises, on pose notre sac sur une chaise libre,
nous nous aide à enlever le gilet, on nous pose les serviettes
sur les genoux, on nous déballe une serviette rince-doigts
et puis une jeune fille vient jouer, juste devant notre table,
deux morceaux de violon. Ensuite, on nous déballe nos
baguettes, on nous sert une crêpe fourrée, on nous
l'ouvre en deux, on nous l'arrose de sauce, on nous la referme,
on nous fait la révérence et c'est nous qui mangeons.
Le premier plat fini, la violoniste revient, on commence à
vraiment avoir envie de rire tous les deux.. Au moment des crevettes,
on nous les sert, on nous prévient que c'est chaud, on
relève mon gilet sur la chaise, on nous remplit nos verres,
on me décortique ma crevette parce que j'ai pris du retard
sur Jean Paul en écrivant. Et on nous sert et ressert
encore, les plats, les verres. On nous prend parfois les couverts
des mains pour nous servir et...révérence... Heureusement
que le repas est bon et le riz chinois aux raisins secs un régal,
car tout ce cérémonial est bien pesant. A la fin,
on nous présente un questionnaire de satisfaction...
Si j'avais vraiment mis ce que je pensais !
En rentrant, nous regardons à la télé le
match de foot Vietnam-Myanmar (7-1) du championnat d'Asie du
Sud-Est où sont engagés onze pays.
Le costume traditionnel : un pantalon surmonté
d'une longue tunique légère, fendue des pieds
jusqu'à la taille et découvrant un petit triangle
de peau au-dessus de la ceinture.
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